Il y a des choses complexes impossibles à imaginer, mais qui se comprennent au premier coup d’œil : la roue, par exemple ; il y a des choses qui s’imaginent par une longue suite de déductions logiques, mais qui sont incompréhensibles à l’œil : le téléphone par exemple.
La roue, si simple d’apparence… Et pourtant des civilisations aussi élaborées et sophistiquées que les Egyptiens ou les Incas ont prospéré pendant des siècles sans être capables de l’inventer.
Le téléphone… Un homme du XVIII ème siècle qui reviendrait sur terre, ne crierait-il pas au miracle ou à la sorcellerie ? Invention inéluctable pourtant, il suffisait de tirer toutes les conséquences logiques des principes successivement découverts.
D’un côté dévider la pelote de l’enchaînement des causes et des effets. De l’autre assembler ensemble des choses qui ne l’ont jamais été, ou jamais de cette manière.
C’était évident, il suffisait d’y penser. Oui, mais personne n’y avait pensé… Une évidence après-coup, une fausse évidence donc. C’est réellement génial, quoique ça ne le paraisse pas.
C’est génial, quelle merveille de technologie… En fait, il suffisait de dérouler la pelote. Un merveille après-coup, une fausse merveille, donc. Ce n’est que complexe, quoique ça paraisse génial.
Ne confondons pas génial et complexe. C’est le génie qui produit de la simplicité. La complexité n’est qu’affaire de compétence, d’application et de persévérance, et ne produit jamais, par définition, de la simplicité.
Mais c’est la complexité qui nous nous émerveille parce qu’elle nous épate.
Emerveillons-nous de ce qui est simple, bien plus de ce qui est complexe. Posons-nous la question : c’est simple, mais était-ce évident ? c’est simple, mais n’est-ce pas génial par sa simplicité même ? Un texte où tout est dit en quelques mots, un dessin où tout est suggéré d’un trait, une mélodie où 3 notes vous bouleversent. Ne sont-ils pas plus grands qu’un texte brillant qui joue de milliers de mots, qu’un tableau chargé de toutes les couleurs de l’arc en ciel, qu’une symphonie à mille exécutants ? Ceux-ci nous épatent, ceux-là touchent au plus profond de nous-mêmes, en faisant vibrer ces si belles cordes que, tous, nous recélons en nous-mêmes, en nous révélant des évidences que nous ne soupçonnions pas.
La grandeur réside dans la simplicité, dit-on. Dans la grande simplicité, ajouterai-je, de cette immense simplicité fruit d’un immense travail de l’esprit, mais aussi du cœur et de l’âme, qui épure toute production de ce qui est accessoire, annexe, superflu, brillant. C’est une flèche qui va droit au but, et non un déluge de feu qui, dans l’espoir souvent vain d’y parvenir, arrose tout aveuglément. Petite fléchette d’enfant pour les simplicités de tous les jours auxquelles nous devons néanmoins prêter toute l’attention bienveillante que nous prêtons à ces enfants que nous aimons tant. Grande flèche d’un tireur d’exception pour ces grandes et si précieuses simplicités qui nous remuent si profondément.
D’abord et avant tout, recherchons et émerveillons-nous de la vraie simplicité !