Il y a les étoiles, il y a le Soleil. C’est une étoile comme une autre, pas particulièrement grande ni particulièrement brillante, mais, pour nous, c’est le Soleil : une étoile qui parmi ses milliards de congénères, occupe une place et joue un rôle si différent et si essentiel.
Toutes les étoiles éclairent, toutes les étoiles chauffent, mais seul le Soleil nous éclaire, seul le Soleil nous chauffe. Quoiqu’infiniment banal dans l’univers des étoiles, c’est un compagnon vital, au sens propre, sans qui nous péririons ni même ne serions jamais nés. Le « pain gagné à la sueur de ton front », c’est aussi lui : cette chaleur écrasante qui nous accable et nous liquéfie, mais source de toutes ces richesses terrestres qui nous comblent pourvu qu’on transpire à les cueillir. C’est le monde de la matière, de la réalité, des dures vérités, des joies âprement acquises.
Les autres étoiles ne nourrissent que nos rêves, mais comme elles le font bien ! Parfaitement inaptes à nous éclairer, à nous chauffer, à nous nourrir, elles parent nos nuits de ces myriades de point lumineux aussi mystérieux que fascinants. Au point qu’à rêver en les contemplant, on en oublie la nuit, cette nuit qui nous enveloppe de son angoissante obscurité dès que notre bon Soleil s’éclipse. Mais que le Soleil paraisse à l’horizon, adieu jolies étoiles, elles s’enfuient comme volée de moineaux apeurés, et s’effacent devant le maître incontesté qui illico, reprend tous des droits et exerce son incontournable pouvoir de chaleur et de lumière.
Il est des gens brillants, il est des gens lumineux. Les uns nous font rêver, les autres nous font comprendre. Les seconds infiniment plus rares que les premiers ; tout comme le Soleil, ils ont ce don et cette capacité uniques, fruits d’une longue et riche expérience de la vie, d’une profonde réflexion, d’une sagesse philosophique construite sur le réalisme et le bon sens, d’une sagesse religieuse fondée sur une vraie humilité, de nous éclairer et de nous réchauffer. De nous éclairer sur les chemins à suivre, de réchauffer notre ardeur et notre foi dans la vie. Ils ne nous font pas évader au pays des songes merveilleux, ils ne nous promettent pas la Lune, mais, bien plus précieux que cela, ce sont des sortes de Princes Charmants qui réveillent en nous tout ce que nous avons de meilleur à notre insu, qui sommeille au plus profond dans l’attente de leur venue.
Les gens brillants ne sont pas de cette aune : aussi nombreux que les étoiles du ciel, ils ne demandent qu’à briller et nous éblouir. Il suffit que le ciel soit dégagé, qu’aucun nuage ne les masque -j’entends que l’esprit soit suffisamment libre pour les entendre- pour que leur charme agisse : non point maléfique, loin de là, mais fugace, évanoui aussitôt qu’il cesse d’agir.
Ils ne nous enrichissent pas, ils ne nous apprennent ni ne nous apportent rien, mais, tout comme l’étoile du ciel qui nous fait rêver l’instant qu’on l’admire, ils nous font rêver de même. Et ma foi, ce n’est pas rien ! Rendons-leur cette grâce de nous procurer un moment de plaisir, voire de bonheur ; mais n’en attendons pas plus, ne nous laissons pas envoûter par leur délicieuse musique, tels ces bêtes sous le charme d’Orphée. N’en abusons pas, ne passons pas, pour égayer une morne existence, d’êtres brillants en êtres brillants, nous finirions dans le seul clinquant !
S’il est sain d’admirer les étoiles de temps à autres, il est essentiel de rechercher le soleil plutôt que de se confiner dans une ombre confortable et lénifiante.
Jouissons sans complexe des êtres brillants qui passent à notre portée, recherchons avidement ces si rares êtres lumineux qui éclairent notre destinée.