Plutôt que de faire ce qui t’apporte du plaisir, attache-toi à faire ce qui t’apporte de la connaissance. Et puis, au fil de la connaissance, tu réaliseras que tu prends un plaisir bien plus grand à acquérir de la connaissance qu’à te faire plaisir.
C’est que le plaisir, souvent la simple répétition d’un plaisir déjà éprouvé, n’apporte rien qui ne soit peut-être agréable, voire intense, mais toujours fugace, et laisse quelque part un goût de cendre.
C’est que chaque nouveau plaisir nous vide un peu plus, chaque nouvelle connaissance nous emplit un peu plus.
La connaissance est une boule de plomb, pesante à traîner et à faire grossir lorsqu’elle est petite, mais qui, au fur et à mesure qu’elle grossit, se transmute en boule d’or. Des liens, des analogies, des références, tout un lacis se forme ainsi des choses accumulées apparemment indépendantes. C’est un tas de briques en vrac qui, par la magie de notre intelligence, par la magie de je ne sais quel architecte divin et inconscient qui veille en nous, se transforme en un palais qui sans cesse s’agrandit, sans cesse s’embellit, sans cesse s’affine, et que l’on éprouve un plaisir de plus en plus vif à parcourir. Dans lequel on s’émerveille d’y découvrir des beautés que l’on ne soupçonnait pas.
Accroître sans relâche sa connaissance, non, ce n’est pas la jouissance obsessionnelle du collectionneur qui accumule, qui rêve sans cesse de la pièce qu’il n’a pas ; non, ce n’est pas la jouissance orgueilleuse de se sentir savant, de se sentir plus savant que le commun des mortels ; non, ce n’est pas le délicieux chatouillement d’amour-propre d’étaler son savoir à l’envie. Accroître sa connaissance, c’est se livrer à cette merveilleuse alchimie qui crée et développe en nous un inestimable trésor ; trésor que nul ne nous volera, qui toujours nous accompagnera partout, et qui, tel le levain de la pâte, nous fait tellement grandir nous-même lorsqu’il s’accroît, si peu que ce soit !